ARTICLE 2 – Refus d’un poste en CDI par un salarié en CDD ou en intérim

Dans le cadre de la Loi « Marché du travail », les pouvoirs publics ont souhaité sanctionner par une privation d’allocations chômage les demandeurs d’emploi qui, de façon abusive, refuseraient d’occuper sous contrat à durée indéterminée un poste similaire à celui précédemment occupé en contrat à durée déterminée ou en intérim.

Cependant, pour que le suivi du ou des refus du demandeur d’emploi d’occuper un poste similaire en CDI soit effectif, l’employeur devra faire face à de nouvelles obligations. Ces nouvelles obligations sont entrées en vigueur au 1er Janvier 2024.

 

Le contexte légal

Pour rappel, la Loi n° 2022-1598 du 21 Décembre 2022 dite « Marché du travail » a introduit dans le Code du travail, par l’article L. 1243-11-1, une procédure particulière lorsque l’employeur propose au salarié en fin de CDD la poursuite de la relation contractuelle de travail sous la forme d’un contrat à durée indéterminée.

En vertu de l’article L 1251-33-1 du Code du travail, la même règle s’applique également pour les salariés en contrat de travail temporaire.

L’employeur doit, en pareil cas, formaliser par écrit et dans un délai raisonnable la proposition de poste et informer l’opérateur indemnisant les demandeurs d’emploi en cas de refus d’occuper le poste proposé.

Cette procédure d’information a pour corollaire la mesure introduite, également par la même Loi « Marché du travail », privant de l’allocation-chômage les salariés en CDD (ou en contrat d’intérim) qui auraient refusé deux fois un contrat à durée indéterminée sur un emploi identique ou similaire dans les 12 mois. L’employeur doit donc informer FRANCE TRAVAIL en cas de refus du salarié.

Cependant, ces mesures d’information par l’employeur et de privation d’assurance chômage n’étaient pas jusqu’à présent entrées en vigueur à défaut de textes d’application.

Le Décret du 28 Décembre 2023 et l’arrêté du 3 Janvier 2024 sont venus préciser les modalités d’application de l’obligation d’information.

1. Conditions de la proposition au salarié

Conditions de fond

 

Seules les propositions de CDI à l’issue d’un CDD ou d’un contrat d’intérim refusées par le salarié peuvent faire l’objet d’une déclaration obligatoire à France Travail.

Ces propositions sont, elles-mêmes, conditionnées et encadrées. En effet, il convient de distinguer selon que la proposition de CDI est réalisée au cours d’un CDD ou d’un contrat d’intérim :

 

  • Si la proposition de CDI est faite à un salarié en CDD : cette proposition doit concerner un même emploi ou un emploi similaire, être assortie d’une rémunération au moins équivalente pour une durée de travail équivalente, relevant de la même classification et sans changement du lieu de travail (article. L. 1243-11-1 du Code du travail).
  • Si la proposition de CDI concerne en revanche un salarié en contrat d’intérim : dans ce cas, elle doit porter sur le même emploi ou un emploi similaire, sans changement de lieu de travail (article. L. 1251-33-1 du Code du travail).

 

A contrario, les propositions de CDI qui ne s’intègrent pas dans ces hypothèses n’entrainent pas d’information obligatoire de France Travail. Par exemple, en cas de proposition de CDI pour un poste de travail non similaire à celui occupé par le salarié, le refus de ce dernier ne déclenche pas la procédure obligatoire de déclaration du refus à France Travail.

 

Enfin, comme le prévoit l’article R. 1243-2 du Code du travail, la proposition de CDI doit, dans tous les cas, être réalisée avant le terme du CDD ou de la mission d’intérim.

 

Conditions de forme

 

Depuis le 1er Janvier 2024, l’employeur qui veut proposer un CDI à l’issue d’un CDD ou d’un contrat d’intérim sur un emploi identique ou similaire doit respecter une procédure particulière :

  1. L’employeur est tenu de notifier cette proposition au salarié par lettre recommandée avec accusé de réception, par lettre remise en main propre contre décharge ou par tout autre moyen donnant date certaine à sa réception, avant le terme du contrat à durée déterminée (ou du contrat d’intérim).
  2. L’employeur doit accorder au salarié un délai raisonnable pour se prononcer sur la proposition de contrat à durée indéterminée en lui indiquant qu’à l’issue de ce délai de réflexion, une absence de réponse de sa part vaudra rejet de cette proposition. Si la notion de délai raisonnable est laissée à l’appréciation de l’employeur, un délai compris entre 8 et 15 jours calendaires devrait être suffisant.

 

ATTENTION : Afin d’éviter tout litige avec le salarié, il est conseillé de préciser dans la proposition de contrat à durée indéterminée les caractéristiques détaillées du poste proposé pour pouvoir démontrer que cet emploi est identique ou similaire et répond bien aux conditions prévues à l’article L. 1243-11-1 ou L. 1251-33-1. Dans le cas contraire, le salarié pourrait reprocher à l’employeur de ne pas avoir été suffisamment informé pour prendre une décision en toute connaissance de cause.

  • En cas de refus du salarié, l’employeur a l’obligation de prévenir France Travail.

 

2. Conditions d’information de France Travail

L’arrêté du 3 Janvier 2024, publié au Journal officiel du 10 Janvier 2024 est venu préciser les modalités d’information de France Travail par l’employeur.

Conditions de fond

 

France Travail doit être informé en l’absence de réponse du salarié ou de son refus de proposition de CDI. L’information donnée à France Travail doit être composée de plusieurs éléments listés par l’article R. 1243-2 du Code du travail, ces éléments variant suivant le contrat en cours avec le salarié.

  • S’il s’agit d’un CDD : l’information doit être composée du descriptif de l’emploi proposé, des éléments de justification permettant de démontrer que l’emploi proposé est identique ou similaire à celui occupé en CDD, que la rémunération proposée est au moins équivalente, que la durée de travail proposée est équivalente, que la classification de l’emploi est identique et que le lieu de travail est identique.
  • S’il s’agit d’un contrat d’intérim : l’information doit être composée du descriptif de l’emploi proposé, des éléments de justification permettant de démontrer que l’emploi proposé est identique ou similaire à celui de la mission effectuée et que le lieu de travail est identique.

 

Dans tous les cas, il convient également d’indiquer le délai laissé au salarié pour répondre et la date du refus, qu’il soit express ou tacite.

Dans le cas d’un refus tacite, il est nécessaire d’indiquer la date d’expiration du délai de réflexion laissé au salarié.

  1. NB. Si les informations sont incomplètes, France Travail peut demander des éléments complémentaires à l’employeur ou l’entreprise utilisatrice, qui bénéficie alors d’un délai de 15 jours pour répondre.

Conditions de forme

 

Cette information devra être réalisée par voie dématérialisée sur une plateforme dédiée, consultable depuis le site internet de FRANCE TRAVAIL dans un délai d’un mois maximum à compter du refus express ou tacite du salarié.

La plateforme est accessible à l’adresse suivante : https://www.demarches-simplifiees.fr/commencer/refus-de-cdi-informer-francetravail

Réponse délivrée par France Travail au salarié

France Travail informera le salarié à réception de l’ensemble des informations, d’une part de la réception de l’ensemble des informations le concernant et, d’autre part, des conséquences du refus de CDI sur l’ouverture de droit à l’allocation d’assurance chômage.

Il est rappelé qu’à l’issue d’un CDD ou de missions d’intérim, si le salarié a refusé, au cours des 12 mois précédents, au moins deux propositions de CDI qui remplissaient toutes ces conditions, l’intéressé ne bénéficiera plus de l’allocation d’assurance-chômage.

 

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