Inutile de prouver son préjudice pour obtenir réparation d’une atteinte au droit à l’image

Cour de Cassation, Chambre Sociale, 19 janvier 2022, n° 20-12.420

 

Après la rupture de son contrat de travail si le salarié refuse que l’employeur continue à utiliser son image, il doit procéder à la suppression de l’image sous peine d’être redevable de dommages et intérêts.

 

Il est rappelé que dans le cadre de son contrat de travail, le salarié est subordonné au pouvoir de direction de son employeur. Pour autant, il n’est pas privé de ses droits fondamentaux attachés à la personne et notamment de son droit à l’image.

 

Ce droit est garanti par l’article 9 du Code civil, y compris au-delà de la fin du contrat de travail, si le salarié n’a pas consenti à l’utilisation de son image.

 

Dans cet arrêt du 19 janvier 2022 la Cour de cassation confirme des solutions antérieures retenues par des juges de fond en matière de droit à l’image. La négligence de l’employeur à faire droit au souhait de ses ex salariés de voir leur image supprimée peut entrainer de ce seul fait, réparation du dommage.

 

Dans cette affaire, deux salariés ont été licenciés. Environ un an plus tard, ils sollicitent leur employeur pour qu’il supprime une photographie de l’ensemble de l’équipe sur laquelle ils apparaissent et diffusée sur le site internet de l’entreprise. L’employeur ne s’est exécuté que postérieurement à la communication des conclusions de première instance de ces derniers devant le juge prud’homal.

 

Les salariés réclament alors des dommages et intérêts pour le préjudice subi mais n’obtiennent pas gain de cause devant la Cour d’appel. Cette dernière considère non seulement que la photographie litigieuse a été finalement supprimée par l’employeur mais également que les salariés n’ont pas démontré le préjudice personnel, direct et certain résultant du délai de suppression de la photographie en question. Ils forment alors un recours devant la Cour de cassation.

 

La chambre sociale de la Cour de cassation écarte le raisonnement des juges du fond. Se fondant sur l’article 9 du Code civil, elle affirme que le droit dont la personne dispose sur son image porte sur sa captation, sa conservation, sa reproduction et son utilisation, et que la seule constatation d’une atteinte ouvre droit à réparation.

 

En cas de départ d’un salarié de l’entreprise, l’employeur doit donc veiller rapidement à supprimer l’image du salarié. Un délai d’un an voire 6 mois semble tardif. A noter que la jurisprudence a toutefois validé des clauses dans les contrats de travail par lesquelles un salarié accepte l’utilisation de son image par l’entreprise pour une durée raisonnable (10 ans) après la cessation du contrat de travail (Cour d’Appel de Paris, arrêt du 18 Octobre 1984 ; Cour de Cassation, Chambre sociale, arrêt du 18 Décembre 1996).